Texture
Comme il est possible que la mer ressasse
il est certain que notre cerveau ressasse les mêmes rumeurs
la vie se vêt se dévêt d'évidences
l'hypothèse s'hypothèque de présences
l'approximation qui goutte à goutte s'écoute
s'écoule
nous avons eu le temps de voir où le sang s'enchevêtre
reprendre le fil
et tisser les mots dans le sens des courants
j'écris j'ai cris crissements
points silences
nulle part où aller
vers la connivence des convergences
nulle part où aller
assigné à l'évidence
qui s'évide se vit danse
nous avons eu le temps d'approximer l'apparence
de denses transes transitoires
le temps de respirer goutte à goutte
le temps qui passe
déroule ce fil d'encre
qui écrit ses méandres
ferme ses boucles
emprisonne le sens
avance cette texture aux virgules flottantes
insaisissables aux abords du monde
à la périphérie des pensées
s'installe une évidence tranquille
de l'immédiateté des choses
circulent de savantes sèves
s'apprivoisent de songeuses clartés
s'émoussent d'imperméables certitudes
pour que s'invente le tâtonnement fertile
de l'expérience nouvelle
le temps nous encercle
la fin épouse le début
où commencer
sinon par la fin
s'endormir dans le sommeil repu
de toutes les réponses facilement trouvées
ou trouver la force de débusquer la farce
ou bien laisser courir nos vives envies de vie
que notre hantise du néant
ne nous anéantisse
avec la saveur du savoir
s'apercevoir de la course décousue des mots courants
courant vers le vide
tissées du néant surgissent les images
minutes de minutie
qui s'amenuisent
et menuisent les boîtes à idées
du vent qui souffle dans nos têtes
sans entraves sans emphase
nos phrases se déphasent
nous dépassent
se heurtent à la ponctuation du rien
et souvent il faut que la vie s'invite à la défaite
quand l'élocution se disloque
et que l'éloquence tombe en loques
le regard hagard retourne au hasard
la peau des images
rien ne nous indiquera les carrefours du silence
ni les connexions du non-dit
rien ne apprendra à nous taire
ample s'avance la vie
il faudra qu'elle s'invente un inventaire
qu'elle s'invite à la danse
et qu'elle se fasse un devoir
de voir l'évidence
du possible
il faut en terminer avec l'inexorable histoire
lorsqu'elle bégaie naufragée
au milieu des mêmes mythologies obscènes
finir par le commencement
s'éveiller dans l'acuité des questions non résolues
que notre hantise du néant
ne nous anéantisse
dans la certitude de savoir
que nos envies de vie
ne s'avilissent
en vies lisses
allongé dans un canapé d'idées préconçues
communes ou précieuses
le confort se réconforte fortement
du coté du néant fainéant
ou bien penser debout
au bout d'un fil à peine visible
siphonnons la symphonie
râpons la rhapsodie
oublions la prosodie
évitons la parodie
changeons d'agonie
nerveuses terminaisons
nervures dans l'arborescence de la mémoire
il faudrait peut-être entendre
la mélodie du sous-sol aussi
vertes symétries au regard de l'eau
éphémères mères d'instants solides
reposés déposés sur la flèche du temps
qui rapace
passe repasse
nous dépasse
nous déplace les mailles de la carapace
et l'on se carapate en cataractes
dont acte
tu ripolines pour rien
si tu dérapes sur tes rimes
tu trimes dans la frime infirme
tu te démènes tu te démines
confit confetti déconfit
envolé sous la pluie
l'étincelle d'un regard
te ramènes en envie de voir
de t'émouvoir aussi